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Robotech II: The Role-Playing Game

Couverture de la première édition originale du jeu de rôle Robotech II: The Role-Playing GamePour négocier la paix avec les Maîtres de Robotech, le Gouvernement de la Terre Unifiée envoie vers Tirol les Forces Expéditionnaires Robotech : leurs soldats les plus émérites dirigeant une flotte de navires équipés des technologies les plus abouties et escortés par le SDF-3, pinacle de l’armée terrienne. Mais une fois arrivée à destination, cette armée constate que le monde de leurs ennemis est tombé aux mains d’un adversaire encore plus implacable, pour lequel la notion de paix ne peut exister : les invids…

Parce-que Robotech II: The Role-Playing Game utilise le même système de jeu que le titre précédent de la série, Robotech, The Role-Playing Game (Palladium Books ; 1986), il semble peu productif de s’attarder sur cet aspect de l’œuvre puisqu’elle présente au fond les même limites que l’autre. Au lieu de ça, mieux vaut insister sur sa dimension informative. Car la série TV que ce jeu de rôle sur table adapte, Robotech II: The Sentinels, ne vit jamais le jour – du moins sous une forme complète. De sorte qu’à moins de se pencher sur les adaptations en comics ou en romans, des œuvres hélas devenues plutôt difficiles à se procurer, les fans ne peuvent goûter qu’à travers le contenu de cette adaptation en deux volumes le contenu et le potentiel de ce projet malheureusement avorté de séquelle à ce qui reste encore à ce jour une des meilleures itérations de la science-fiction sur le petit écran.

Page intérieure du livre de règles du jeu de rôle Robotech II: The Role-Playing GameBien sûr, les divers éléments déjà présents dans les volumes précédents de la série, ceux correspondants aux différentes époques de la série TV Robotech (Robert V. Barron ; 1985) et qu’on trouve pour l’essentiel dans Macross, Southern Cross et Invid Invasion, deviennent un peu redondants. Par contre, on apprécie d’en savoir plus sur plusieurs choses évoquées dans l’œuvre originale, tel que le croiseur SDF-3, mais aussi d’autres entièrement spécifiques à Robotech II, qu’il s’agisse de personnages – déjà connus ou nouveaux-venus –, de races extra-terrestres – parfois assez surprenantes – ou encore de mechas – au sens large du terme désignant des éléments technologiques futuristes.

On peut évoquer en particulier les destroids des REF et les engins des zentraedi, mais aussi les fameuses Sentinels et parmi celles-ci des choses aussi colorées que les amazones de Praxis, le peuple-chat de Garuda ou encore les hommes-ours de Carbonara, parmi d’autres ; on regrette, par contre, que ces derniers ajouts donnent à ce développement de l’univers de Robotech des accents clairement orientés vers une science-fiction grand public assez dépourvue d’âme. De leur côté, les invids se trouvent ici sous la direction de l’entité mâle de leur chef suprême, le Regent, qui utilise les mêmes troupes que son complément féminin mais leur ajoute, en plus de divers véhicules, des combattants Inorganics auxquels il vaut mieux éviter de se frotter…

Couverture de la première édition originale de l'extension REF Field Guide pour le jeu de rôle Robotech II: The Role-Playing GameVoilà comment ce volume prend vite un aspect encyclopédique qui ne manque pas de charme, et notamment en stimulant l’imagination du lecteur. Si les fans les plus acharnés auront déjà mis la main sur les quelques artbooks officiels parus au début des années 90 et maintenant presque impossibles à trouver, les autres pourront combler leurs lacunes avec cette paire de tomes dédiés à Robotech II par Palladium. Ça ne vaut certes pas l’original mais c’est toujours mieux que rien…

Robotech II: The Role-Playing Game
Palladium Books, 1988
160 pages, env. 20 €

– le site officiel de Palladium Books
– le site officiel de Robotech

Robotech, The Role-Playing Game

Couverture de la première édition du premier volume de l'adaptation en jeu de rôle de la série TV RobotechSur la planète Tirol, dans la constellation de la Croix du Sud, une civilisation doit  résoudre un problème vital : développer une nouvelle source d’énergie. L’un d’eux, Zor, découvre sur un monde habité par des êtres protoplasmiques et primitifs appelés Invids un type de végétal, la Fleur de Vie, qui une fois traité permet d’obtenir une quantité quasi-illimitée de puissance. Désormais tributaire de cette technologie, Tirol devient un empire autocratique qui dépouille les Invids de la Fleur de Vie pour asseoir définitivement sa puissance.

Mais, incapables de survivre sans Fleur de Vie, les Invids développent des armes avec une technologie inspirée par Zor afin d’aller reprendre leur bien aux tiroliens. Alors que Tirol menace de s’effondrer, Zor fuit son monde à bord d’un navire qui transporte une matrice capable de régénérer la Fleur de Vie : si son équipage ne survivra pas, le vaisseau finira par échouer sur une planète inconnue – la Terre.

Ce genre de chose arrive : le succès d’audience et le profit qu’il engendre attirent l’attention de toutes sortes de gens qui, sinon, n’auraient prêté aucune attention à l’objet dudit succès. Ainsi, la série TV Robotech (Robert V. Barron ; 1985) connut-elle à peu près à l’époque de sa première diffusion une déclinaison sur le grand écran sous la forme du film Robotech: The Untold Story (Carl Macek & Noboru Ishiguro ; 1986) avant de se voir adaptée sous la forme d’un jeu de rôle sur table, sous le titre fort à-propos de Robotech, The Role-Playing Game, par l’éditeur Palladium Books de 1986 à 1998. Voilà comment débuta une série d’ouvrages qui compte pas moins de quatorze volumes, dont plus d’une dizaine sortis moins de trois ans après le premier.

Mais que ces quelques arbres-là ne cachent pas la forêt, car on a bel et bien affaire ici à une adaptation. En d’autres termes, les limites de cette déclinaison de franchise tiennent dans les efforts que déployèrent ses auteurs pour faire entrer dans le moule de leur système de jeu un univers qui en débordait visiblement. Car Robotech, entre autres en raison de ses origines pour le moins hors normes, s’avérait bien trop vaste pour trouver un système de jeu à sa pleine mesure dans le carcan du Palladium Megaverse ; celui-ci, en effet, et au moins dans les grandes lignes, se différencie somme toute assez peu du système Donjons & Dragons (E. Gary Gygax & Dave Arneson ; 1974), voire du système Basic Role-Playing de l’éditeur Chaosium Inc.

Couverture de la première édition du quatrième volume de l'adaptation en jeu de rôle de la série TV RobotechVoilà pourquoi les joueurs trouveront vite quelques difficultés à vouloir exécuter durant leurs parties le même type d’actions et de manœuvres que les héros de la série TV, surtout en ce qui concerne le pilotage des différents appareils et mechas. Augmenter les capacités des personnages à travers leurs différents attributs et talents ne permettra pas davantage de résoudre ce problème tout de même assez épineux – j’en sais quelque chose, j’y ai consacré quelques heures de ma vie… En fait, le système Palladium s’avère tout simplement trop générique, au point que seules l’imagination et la créativité des joueurs permettent d’en compenser les défauts. Comme tous les jeux de rôle, vous me direz, mais à la différence près qu’ici ces défauts se trouvent sans cesse soulignés par une série TV que les fans connaissent sur le bout des doigts…

En fait, ce titre ajoute un seul élément au Palladium Megaverse : la notion de mega-damage, des sortes de points de vie augmentés équivalent chacun à 100 points de vie normaux, qui permet d’illustrer la résistance du blindage des mechas et qu’on trouvera par la suite dans la série des Rifts (même éditeur ; 1990) – d’ailleurs, on peut en voir une itération comparable dans la série de jeu de rôle Mekton II (R. Talsorian Games, 1987), pour dire comme le concept se trouvait dans l’air du temps… Mais tout aussi astucieux qu’il soit, cet aspect amenait lui aussi son lot d’incohérences puisque des « méga-blindages » ne pouvaient, dans le jeu, être altérés par des armes ne produisant pas de mega-damages… alors que ça se produisait sans cesse dans la série TV.

Et à ceci s’ajoutent les inévitables ajouts et autres inventions d’auteurs peu inspirés mais néanmoins payés pour pondre un supplément à l’intérêt d’autant plus discutable que personne n’utilise jamais son contenu. Sans oublier, affirment certaines rumeurs, les éléments proposés par des fans qui, dit-on, ne virent jamais la couleur de l’argent que ça aurait dû leur rapporter ; il m’est d’ailleurs arrivé de voir dans un volume d’extension des choses ressemblant étrangement à du matériel que j’avais conçu moi-même avant de l’envoyer à un magazine spécialisé lié à Palladium Books et qui devait obtenir son aval avant de publier ce que je leur proposais… Voilà aussi comment cette série atteignit le nombre peu négligeable de presque quinze volumes.

Couverture de la première édition du cinquième volume de l'adaptation en jeu de rôle de la série TV RobotechMais en dépit de ces faiblesses flagrantes, Robotech, The Role-Playing Game devint vite une source d’informations prisée par les fans de la série TV originale qui pouvaient y trouver toutes sortes de renseignements restés longtemps inaccessibles autrement. Et puis c’était aussi le seul moyen de jouer dans l’univers hors norme de Robotech.

Ce qui, de nos jours, vu le nombre de jeux tirés de cette licence, tous médias confondus, s’avère une raison bien moins pertinente qu’à l’époque…

Notes :

L’adaptation se poursuivit à travers les deux volumes tirés du projet de série TV avortée, Robotech II: The Sentinels (Taro Harase ; 1986), et dont le premier fera l’objet d’une chronique prochaine.

Une nouvelle série d’ouvrages, basée sur le film d’animation Robotech: The Shadow Chronicles (Tommy Yune & Donk-Wook Lee ; 2005), fut lancée en 2008.

Robotech, The Role-Playing Game
Palladium Books, 1986
110 pages, env. 20 €

– le site officiel de Palladium Books
– le site officiel de Robotech

Heavy Gear

Couverture de la première édition canadienne originale du jeu de rôle Heavy GearTerra Nova, jadis la fierté des colonies de la Terre Unifiée, se trouva soudain livrée à elle-même quand une récession économique sans précédent frappa la planète-mère et la força à abandonner ses mondes colonisés. L’effondrement du système vit l’émergence de nouveaux véhicules de combat, les Heavy Gears, qui devinrent vite un élément-clé de chacune des deux factions majeures de Terra Nova : les Cités-États Confédérées du Nord et les Territoires Alliés du Sud, tous deux fondés dans le chaos et le sang.

Séparés par une vaste bande de terre et de sable qui s’étend le long d’un équateur surchauffé, un désert aride appelé « badlands » et où croupissent les réprouvés, les criminels et les fous, ces deux blocs se livrent à présent une guerre sans merci pour la domination de Terra Nova.

Une caractéristique essentielle distingue Heavy Gear des autres productions du type jeu de rôle sur table : ce titre ne se contente pas de proposer un univers dans lequel les joueurs pourront faire vivre des aventures à leurs personnages, mais il narre bel et bien un récit ; encore que je devrais plutôt dire qu’il donne aux joueurs la possibilité d’écrire divers paragraphes de ce chapitre de l’histoire du futur (1) que présente ce jeu, ce qui reste assez différent. En effet, il va assez de soi qu’aux deux factions présentées dans le synopsis ci-dessus va bientôt s’en ajouter une troisième, mais comme un moyen de faire avancer la narration évoquée, et non juste pour enrichir l’univers à travers l’édition de suppléments.

Couverture du supplément Tactical Air Support pour le jeu de rôle Heavy GearPour cette raison, chaque volume de cette série présente sur son quatrième de couverture une date écrite en vert dans un cadre rouge, ce qui permet de situer un ouvrage en particulier dans la chronologie de la narration – faute d’un meilleur terme. Quant au contenu de chacun de ces livres, il fournit ici et là des indications précises comme de simples indices sur l’évolution de cet univers tout au long du déroulement des événements. Heavy Gear permet donc aux joueurs de participer, au moins indirectement, à cette aventure au départ conçue pour s’écouler sur une trentaine d’années environ dans l’univers du jeu. Ce qui correspond assez bien à cette idée typique de la science-fiction comme quoi demain ne sera pas la même chose qu’aujourd’hui…

Aussi Heavy Gear se veut réaliste dans son approche de la création d’univers de jeu de rôle, ce dont on s’étonne peu de la part des canadiens de Dream Pod 9 qui fondèrent jadis le magazine Mecha Press, publication dédiée au genre mecha en général et notamment son « école réaliste » : Heavy Gear présente donc une grande exigence de crédibilité dans ses aspects narratifs comme techno-scientifiques. Ainsi, mis à part le concept des Portes de Tannhäuser qu’utilisèrent jadis les humains pour coloniser des planètes situées au-delà du système solaire, tout ou presque dans Heavy Gear se montre assez familier – même les mechas, qui ici ne mesurent que quelques mètres de haut au lieu de 20 et se pilotent à l’aide d’un casque à réalité virtuelle (2).

Couverture du supplément Northern Vehicles 2 pour le jeu de rôle Heavy GearMais on y trouve aussi des résurgences de la conquête de l’Ouest, élément somme toute assez caractéristique du space opera américain, avec cette omniprésence du sable et du désert mais aussi ces colons coupés de l’ancien monde de leurs ancêtres – sauf qu’il s’agit ici d’un océan d’étoiles au lieu d’eau. Sur le monde de Terra Nova règnent la débrouille et le recyclage permanent : on y cache la rouille sous une simple couche de peinture et on répare les engins de haute technologie avec de la ficelle et du chewing-gum. Escrocs et arnaqueurs de tous poil pullulent entre les trafiquants à la petite semaine et les mercenaires de haut vol. Et la violence, pas toujours larvée, se tapit dans les moindres ombres avant de bondir sur sa proie.

Le futur de Heavy Gear ne scintille pas, donc, bien au contraire. C’est un monde de réprouvés, d’abandonnés à leur sort, de survivants d’une guerre civile qui s’est éternisée trop longtemps avant d’accoucher d’un nouvel échiquier politique planétaire tout juste bon à déboucher sur un autre conflit, tout aussi sanglant. Sur Terra Nova, le répit ne dure jamais longtemps… Alors, comme la nécessité rend ingénieux, on s’adapte pour disparaître le plus tard possible, en apprenant de tout et de rien. Voilà pourquoi vous ne trouverez pas de classes de personnage à proprement parler, mais juste des attributs à combiner à des niveaux de talents pour obtenir des modificateurs à vos jets de dés – un peu comme dans Cyberpunk 2020 (R. Talsorian Games ; 1990).

Couverture du supplément Equipment Catalog pour le jeu de rôle Heavy GearDe la même manière qu’Interlock, le système de règles Silhouette de Dream Pod 9 se veut donc aussi rapide que réaliste (3). Et pour cause, lui aussi un héritier de Battletech (FASA Corporation ; 1984) et de son jeu de rôle Technoguerriers (Mechwarrior ; même éditeur, 1986), il permet de résoudre les combats à travers un jeu de guerre sur plateau – ou plutôt, pour me montrer plus précis, une carte à hexagones… Silhouette s’affirme donc comme un système de gestion des actions simple et bref mais aussi précis pour déterminer un vainqueur entre plusieurs prétendants, à travers un ensemble de règles qui convient aussi bien aux aficionados de wargames qu’aux rôlistes – mais au détriment de la précision puisque on ne peut tout avoir…

Enfin, et comme il se doit dans nombre de jeux de ce type mettant en scène des mechas, comme ceux déjà cités ici, Heavy Gear permet aussi de construire ses propres véhicules, mais à travers une méthode un peu particulière. La première des 16 étapes de construction qu’il présente, en effet, consiste à choisir le nombre de personnes servant d’équipage au véhicule – au lieu de partir de son poids comme c’est le cas le plus souvent. Ensuite, une calculatrice s’avère nécessaire car les calculs requis utilisent des puissances – de deux et de trois – et des racines carrées. C’est le prix du réalisme dont se réclame cette licence, qui s’exprime donc ici jusque dans la conception des mechas – au sens le plus large du terme : ceux à forme humaine et les autres.

Couverture du supplément Tanks & Artillery pour le jeu de rôle Heavy GearSi on juge la popularité d’un jeu de rôle au nombre de ses suppléments, alors Heavy Gear compte parmi les réussites du domaine puisqu’on compte à ce jour plus de 100 livres et accessoires de jeu participant tous à décrire un univers devenu à ce jour extrêmement détaillé : il vous sera donc difficile de ne pas pouvoir mettre la main sur ce qu’il vous faut pour votre campagne, aussi originale et éloignée des sentiers battus qu’elle se trouve. Et peut-être même trouverez-vous bien plus…

(1) dans le vocable de la science-fiction, ce terme désigne une suite de récits qui dépeignent un avenir en évolution et dont chaque histoire permet d’en explorer un segment ; beaucoup d’écrivains de science-fiction ont produit des séries de ce type, tels qu’Isaac Asimov (1920-1992), Arthur C. Clarke (1917-2008) ou Robert A. Heinlein (1907-1988), pour citer les plus connus.

(2) l’inspiration, ici, semble tirée en droite ligne de la série TV Armored Trooper Votoms (1983) de Ryosuke Takahashi auquel l’« école réaliste » du genre mecha doit ses œuvres les plus marquantes, comme Dougram (1981), Gasaraki (1998) ou Flag (2006), parmi d’autres…

(3) on peut rappeler que Dream Pod 9 produisit avant Heavy Gear un univers, Jovian Chronicles, pour le Mekton II de R. Talsorian Games, ce qui permet de penser qu’ils étaient pour le moins familiers du système Interlock.

Adaptations :

La popularité de Heavy Gear se mesure aussi à son succès en dehors des cercles des jeux de rôle. Ainsi, les jeux vidéo Heavy Gear et Heavy Gear II, publiés respectivement en 1997 et 1999 par Activision, qui venait de perdre les droits de la franchise Mechwarrior, connurent-ils chacun un franc succès – au point d’ailleurs que nombre de publications spécialisés taxèrent le second volet de meilleur titre du genre à l’époque.

Une série TV d’animation en 3D de pas moins de 40 épisodes se vit aussi tirée de Heavy Gear, mais sur laquelle Dream Pod 9 eut très peu d’influence, et qui de plus ciblait un public assez jeune. Les éléments mûrs tels que guerre et géopolitique y sont absents, au profit d’un tournoi de combats d’arène assez répétitif.

Heavy Gear
Dream Pod 9, 1995
258 pages, env. 30 € (import)

HeavyGear-France
– le site officiel de Heavy Gear
– le site officiel de Dream Pod 9

Deep Space

Couverture de l'édition originale américaine de l'extension Deep Space pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Au-delà de la frontière.

La Terre tourne en silence au-dessous. Une boule d’humanité bouillonnante, prise au piège dans un environnement toujours plus pollué. Et pendant ce temps, des aventuriers de la frontière combattent des corporates véreux pour ce qu’il reste de « bon » train de vie. Il ne reste plus qu’un endroit où aller pour le genre humain…  en haut… et plus loin encore s’il le faut.

Vers un endroit de froid absolu et de parfaite clarté, où d’immenses mondes cylindriques tournent dans le ciel, des chasseurs deltas fins comme des aiguilles filent sur des trajectoires d’interception, et des véhicules orbitaux évoquant des araignées ceinturent les titanesques treillis blancs d’explorateurs de planètes éloignées.

L’humanité atteint… l’espace profond – Deep Space. (1)

Page intérieure de l'extension Deep Space pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Les productions qui se réclament du cyberpunk en exploitent peu cet aspect, et pourtant on le distinguait déjà très clairement dans Neuromancien (William Gibson ; 1984), roman fondateur du genre : comme dans la plupart des manifestations de la science-fiction, la colonisation de l’espace tient ici une place prépondérante. Au reste, et puisque le monde s’y trouve aussi à l’agonie, il paraît assez logique de se tourner vers la seule véritable issue qu’il reste ; dans ce sens, d’ailleurs, le cyberpunk se montre en fin de compte assez optimiste puisqu’en dépit de toute sa noirceur et sa violence il laisse malgré tout une voie de sortie – et même si le chemin vers celle-ci se fera dans la douleur et le sang…

Ou plus précisément dans la technique et la science, ce qui sous certains aspects revient au même. Voilà pourquoi cet ouvrage s’ouvre sur une présentation générale de l’environnement que décrit en détail cette extension de Cyberpunk 2020. Comme la plupart des suppléments de jeux de rôle sur table vous me direz, mais dans ce cas précis les données scientifiques et technologiques prennent une place inhabituellement prépondérante. Le thème veut ça, en fait : la conquête de l’espace, en effet, demeure encore un domaine à la complexité inouïe ; la liste de références utilisées par les auteurs, en fin de volume, reflète très bien ce simple fait, et nous assure d’ailleurs du sérieux avec lequel ce livre fut rédigé.

Page intérieure de l'extension Deep Space pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020À vrai dire, Deep Space frise la vulgarisation scientifique par moments. Sa présentation des corps majeurs du système solaire assortie des divers tableaux comparatifs se montre exemplaire de sobriété et de précision à la fois, mais sans sacrifier la souplesse de jeu pour autant, ce qui n’étonne plus de la part de son éditeur. Pareillement, les descriptions des effets du milieu spatial sur les technologies en général et les cybernétiques en particulier en surprendront plus d’un parmi vous qui croient encore que « jeu » reste synonyme d’« approximatif » – beaucoup de créateurs de productions dites populaires pourraient d’ailleurs en prendre de la graine, quel que soit leur média d’expression.

La même rigueur transparaît aussi des divers véhicules, équipements, habitats, armes, etc que propose cette extension. Pour cette raison, et puisque le futur se veut ici crédible, les fans de Star Wars n’y trouveront pas leur compte. Avec son focus sur le réalisme, Deep Space décrit des moyens de transport lents qui exigent de longs et fastidieux calculs – pour les personnages bien sûr – afin de mener les équipages à bon port, et des modes de vie où la mort surgit en un instant par brusque dépressurisation ou bien au bout de longues années suite à l’exposition aux rayons cosmiques qui provoquent cancers, tumeurs et leucémies. L’espace, en réalité, n’est pas fait pour l’Homme…

Page intérieure de l'extension Deep Space pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Et pour ceux d’entre vous que ce portrait rebute tant il donne l’impression d’un ouvrage inutilement complexe, la courte campagne Red Conflict qui le parachève vous permettra de voir qu’il n’en est rien. En fait, cette aventure peut aussi être un moyen de rehausser une partie de Cyberpunk 2020 avec le piment d’une ambiance comparable à celle d’un film comme Outland (Peter Hyams ; 1981), voire même Alien : Le Huitième passager (Ridley Scott ; 1979), parmi d’autres exemples.

Et puis, qui sait ce que trouveront les expéditions lancées vers la ceinture d’astéroïdes et Jupiter ?

(1) la traduction de ce quatrième de couverture est de votre serviteur.

Note :

Deep Space remplace complétement et met à jour Near Orbit, le supplément précédent pour Cyberpunk 2020 qui abordait le thème de la colonisation de l’espace.

Deep Space
R. Talsorian Games Inc., 1993
120 pages, env. 30 € (import seulement)

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Cyberpunk 2021, site de fans et de ressources de jeu

Mekton Zeta

Couverture de l'édition française du jeu de rôle Mekton ZetaLe système complet pour des aventures dans un style véritablement anime ! Des règles de construction épurées pour tous les types de mechas, des simples voitures transformables jusqu’aux vaisseaux spatiaux longs de plusieurs kilomètres. Des règles rapides mais détaillées pour couvrir tous les types d’action caractéristiques des animes, de la dévastation de planètes entières aux prises de kung-fu les plus sophistiquées – le tout avec le style et l’éclat de vos animes favoris !

Action. Romance. Mechas. Ils sont tous dans – Mekton Zeta ! (1)

Vous êtes rôliste (2) mais aussi fan d’animes, de préférence aux nettes tendances mechaphile, et vous cherchez de quoi concilier ces deux passions ? N’allez pas plus loin, voilà ce qu’il vous faut. Après Mekton (Mike Pondsmith ; 1984), d’abord le wargame puis le jeu de rôle, et Mekton II (même auteur ; 1987), la seconde édition qui combine ces deux types de jeux, Mekton Zeta s’affirme comme la version ultime, la forme définitive de ce titre d’exception à défaut de prolifique car au succès en fin de compte plutôt modeste – voire même « de niche » : c’est le lot de la culture mecha en occident après tout… Ici, vous trouverez tout ce qu’il vous faut non seulement pour recréer de A à Z l’univers de votre anime favori mais aussi pour inventer le vôtre.

Couverture de l'édition américaine originale de l'extension Mekton Zeta Plus pour le jeu de rôle Mekton ZetaSi, dans les grandes lignes, les différences entre cette troisième édition et la précédente de six ans son aînée restent assez ténues, cette dernière se présentant somme toute comme une version revue et augmentée, le principal attrait de Mekton Zeta réside dans son système de construction de mechas – ou du moins celui que présente sa première extension, Mekton Zeta Plus. Car au lieu de proposer une liste de pièces à combiner pour obtenir le mek’ désiré, celui-ci vous propose rien de moins que de fabriquer les pièces elles-mêmes. L’unique limite est donc celle de votre imagination, mais une échelle de niveaux de développement technique permet de limiter les capacités des pièces créées selon l’époque – passée, présente ou future – où vous voulez situer votre campagne.

Hélas, l’immense liberté d’action que procure ce système reste aussi son plus grand défaut, car beaucoup de meneurs de jeu se trouveront peut-être assez vite dépassés – j’ai eu l’occasion d’examiner une problématique semblable dans ma chronique du jeu vidéo Armored Core 3 (From Software ; 2003). Pour cette raison, Mekton Zeta propose un élément supplémentaire destiné à étoffer l’univers ébauché dans l’édition précédente, sous la forme d’une seconde faction, l’Étoile Impériale, une race d’extraterrestres militaristes contre laquelle vos joueurs pourront se battre – à moins qu’ils préfèrent en faire partie… L’extension en deux volumes, Invasion Terre, de son côté, sert de campagne en 31 scénarios dans cet univers dont elle expose de nombreux éléments.

Couverture de la première édition américaine du jeu de rôle Mekton ZetaMais la plupart des extensions de l’édition précédente, comme les deux suppléments Mekton Mecha Manuals – qui proposent de nombreux meks’ déjà construits – et la campagne Operation Rimfire, restent dans les grandes lignes compatibles avec cette dernière version et pourront vous fournir bien d’autres éléments de jeux supplémentaires. En fait, si l’univers officiel de Mekton vous plaît, et sa dimension space opera lui permet de présenter une richesse certaine, vous pourrez très bien y jouer sans avoir à vous préoccuper de fabriquer votre propre univers de toutes pièces – c’est juste une possibilité qu’offre ce jeu après tout, non une obligation. Voilà pourquoi vous n’avez somme toute aucune excuse pour ne pas donner sa chance à Mekton

Injustement méconnu en France, et d’autant plus à notre époque où la culture manga fait désormais partie du paysage, Mekton Zeta reste encore à ce jour le pinacle du genre dans le secteur du jeu de rôle sur table. Les vétérans comme les nouveaux venus à ce type de jeu, qu’ils soient ou non fans d’animes en général et de mechas en particulier, y trouveront bien plus que leur compte.

Et en plus de ça, cette dernière édition se base sur le système Interlock qui assure une compatibilité complète avec toute la gamme Cyberpunk 2020 : alors, qu’est-ce qu’il vous faut de plus ?

(1) ce quatrième de couverture est celui de l’édition originale américaine de Mekton Zeta, traduit par votre serviteur.

(2) terme désignant les personnes qui pratiquent le jeu de rôle sur table.

Note :

Bien que des rumeurs circulent depuis 1997 à propos d’une quatrième édition, qui s’appellerait Mekton Double Zeta et utiliserait le système Fuzion, aucune information officielle n’a été communiquée pour le moment. Cependant, on peut mentionner qu’il y a quelques années à peine, R. Talsorian Games a lancé un appel d’offres destiné à des artistes capables d’élaborer des mecha designs de qualité professionnelle : on reste à ce jour sans nouvelles du projet que cette recherche concernait…

Mekton Zeta
Oriflam, 1996
176 pages, env. 36 €

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Mekton Zeta.com, site de fans et de ressources de jeu (en)

Maximum Metal

Couverture de l'édition originale américaine de l'extension Maximum Metal pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Des hélicoptères qui chassent une moto à travers les rues tentaculaires d’une cité ; des combinaisons blindées de corporations en guerre dans une nation du Tiers-Monde ; des silhouettes métalliques anéantissent un conseil d’administration – c’est Maximum Metal en action !

Voilà le supplément sur les véhicules et les scaphandres mécanisés militaires qui « chapeaute » le système de règles de combat de Cyberpunk 2020. Tanks, artillerie, engins de support de troupes au sol, et même les Advanced Combat Personal Armor, tout pour la guerre dans le futur proche est là. Et le tout articulé autour de règles de conception et de combat qui vous permettront de lancer vos joueurs droit dans l’action la plus brûlante qu’ils aient jamais vu – avec le métal poussé au Max ! (1)

Il ne semble plus nécessaire de démontrer l’affection des gens de R. Talsorian Games, Inc pour la culture manga en général et son excroissance que constitue le genre mecha en particulier. Leurs productions, en effet, parlent pour eux, et si l’ombre plane sur ce supplément d’œuvres de référence signées Masamune Shirow, telles qu’Appleseed (1985) et Ghost in the Shell (1989), le concept qui le sous-tend, de son côté, rappelle beaucoup l’extension RoadStriker II pour leur autre titre à succès, Mekton II (1987), sauf que Maximum Metal tend à établir un pont vers le précédent au lieu que ce soit celui-ci qui tente de faire le lien avec Cyberpunk 2020 (1988) – disons que les deux franchises se renvoient la balle, en quelque sorte…

Page intérieure de l'extension Maximum Metal pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020En sont témoins les systèmes de construction pour les véhicules et les scaphandres mécanisés qui prennent ici d’assez nombreuses pages. S’ils se montrent plus synthétiques que celui de Mekton II, ils s’inscrivent néanmoins dans la tradition de Cyberpunk 2020 : à la fois rapides et justes. La prouesse est ici rendue possible par le simple fait que ce système de construction ne se veut pas universel mais cantonné à un futur proche. Ne le croyez pas limité pour autant car ses possibilités se montrent vite immenses. Et si vous ne vous sentez pas de construire les unités dont vos joueurs auront besoin, il y a bien sûr des pages et des pages de « catalogue » dans lesquelles vous pourrez choisir le type d’engin qu’il vous faut.

Des règles avancées de combat de véhicules parachèvent le tout, augmentées d’un chapitre entier consacré aux ACPA (pour Advanced Combat Personal Armor) qui, dans l’univers de Cyberpunk 2020 viennent à peine d’arriver sur les champs de bataille. Bref, tout ce qu’il vous faut – et même plus – pour mener vos guerres corporatistes et autres campagnes très musclées…

(1) la traduction de ce quatrième de couverture est de votre serviteur.

Maximum Metal
R. Talsorian Games Inc., 1993
104 pages, env. 30 € (import seulement)

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Cyberpunk 2021, site de fans et de ressources de jeu

Jovian Chronicles

Couverture de la toute première édition originale candienne du jeu de rôle Jovian ChroniclesAD 2210. Alors que les nations de la Terre se suicidaient sous le poids de leurs passés respectifs, des hommes et des femmes colonisaient les planètes proches du système solaire, jusqu’à la ceinture d’astéroïdes et même la géante Jupiter. Après la chute des dernières superpuissances de la planète-mère, ces colons à présent isolés n’eurent même pas à réclamer leur indépendance. Quand un gouvernement unifié de la Terre vit enfin le jour après un siècle de conflits, la civilisation de l’espace était née…

Si Mekton II (Mike Pondsmith ; 1987) proposait son propre univers, bâti sur les tropes habituel de la science-fiction orientée space opera et d’inspiration anime, la principale caractéristique de ce jeu de rôle consistait néanmoins à encourager les joueurs à créer leur propre monde et son Histoire afin d’en écrire les chapitres les plus marquants à travers leurs campagnes de jeu et leurs divers scénarios. Marc Alexandre Vézina suivit ce conseil à la lettre et, avec l’aide de nombre de ses complices du magazine Mecha Press auquel il contribuait depuis le tout début, il développa l’univers de Jovian Chronicles en s’inspirant directement des ténors de l’animation japonaise de science-fiction mais aussi des auteurs littéraires classiques du genre.

Couverture de la toute première édition originale candienne de l'extension Europa IncidentVoilà pourquoi les férus de hard science (1) se trouveront ici en terrain familier, de même que ceux qui aiment les animes de mechas appartenant à l’école réaliste du genre – tels que Mobile Suit Gundam (Yoshiyuki Tomino ; 1979) ou The Super Dimension Fortress Macross (Noboru Ishiguro ; 1982). À vrai dire, et mis à part quelques éléments ponctuels comme les tribus nomades qui habitent des astéroïdes errants, un élément à l’exotisme certain, l’univers de Jovian Chronicles s’avère en fin de compte bien classique. « Déjà vu » diront certains, qui n’auront pas tout à fait tort… Pourtant, c’est bien ce classicisme qui fait la force de Jovian Chronicles, du moins pour ceux d’entre nous qui aiment la science-fiction d’un Arthur C. Clarke (1917-2008) par exemple.

Ainsi, l’univers de Jovian Chronicles présente-t-il un système solaire colonisé depuis la planète Mercure jusqu’à Jupiter, en passant par tous les mondes intermédiaires et même la ceinture d’astéroïdes. Vénus est terraformée, Mars une planète divisée par des affrontements entre deux factions qui se disputent le pouvoir, et la Terre se remet à peine d’une vaste guerre civile globale de 100 ans où les super-puissances du début du XXIe siècle s’effondrèrent en laissant ainsi le champ libre aux colonies de l’espace ; Jupiter finit par s’affirmer comme la grande gagnante de ce retournement de situation, mais le gouvernement de la Terre unifiée entend bien retrouver sa place de monde leader de la sphère humaine et les tensions montent peu à peu…

Couverture de la seconde édition originale candienne du jeu de rôle Jovian ChroniclesDu coup, le succès de cette licence sur le continent américain étonne assez peu tant son public s’affirme technophile mais aussi friand de scènes politiques complexes. De sorte que quand le succès du sourcebook initial se vit confirmé par l’extension Europa Incident, l’idée germa naturellement de développer plus encore cet univers. Voilà comment Jovian Chronicles se vit adapté en 1997 au système Silhouette développé par Dream Pod 9 pour Heavy Gear, leur premier véritable jeu de rôle original, afin de devenir une ligne de jeu à part entière. Celle-ci connut de nombreux suppléments qui permirent de combiner le jeu de rôle au jeu de plateau en plus de développer chacun des éléments techno-scientifiques et des factions politiques de cet univers.

Si Jovian Chronicles s’affirmait surtout au départ comme un des résultats de l’influence culturelle qu’exerçait déjà à l’époque le Japon sur l’occident, et se cantonnait donc à un certain exercice de style somme toute sans prétention, il n’en est pas moins devenu au fil du temps une franchise d’ampleur tout à fait remarquable et à l’identité propre. Pour ces deux raisons, vous ne regretterez pas de lui avoir donné sa chance.

(1) terme désignant les récits de science-fiction aux bases techno-scientifiques très solides.

Notes :

La toute première édition de Jovian Chronicles, qui se présente sous la forme de deux suppléments pour Mekton II, donc celle chroniquée ici, est surnommée « Green Edition » par les fans de la première heure en raison de la couleur de ses couvertures. La seconde édition, celle adaptée au système Silhouette de Dream Pod 9, est appelée « White Edition » bien que plusieurs de ses extensions présentent une couverture dans des tons bleu sombre.

Jovian Chronicles, Marc A. Vézina, 1992
Ianus Publications, Inc. & Dream Pod 9, 1993
112 pages, env. 40 € (occasions seulement)

le site officiel de Jovian Chronicles (White Edition)
le site officiel de Dream Pod 9
le site officiel de Marc A. Vézina
le site officiel de Ghislain Barbe, Lead Conceptual Artist

Chrome

Couverture de l'édition française de l'extension Chrome pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020J’en connais qui se tuerait pour un peu d’or. Mais toi, t’en as rien à foutre.

Toi, ce que tu veux, c’est du chrome.

Chrome. Ça, c’est le style pour le style et rien d’autre, Si t’es un vrai cyberpunk, tu sais que ce qui compte ce n’est pas ce que tu fais mais comment tu le fais. Si t’es fringué et équipé avec classe, tu pourras t’assumer complétement. Tout ce qu’il te faut, c’est un guide cyber du savoir vivre. Ce bouquin branché, qu’on ne trouve que sur le marché noir, s’appelle un Chrome.

Un Chrome contient plus de 180 articles qui feront de toi un Cyberpunk vraiment dans le coup. Des armes, des armures, des véhicules, le style de vie, des puces, de l’équipement cyber et même des lieux où tu pourras vivre et t’éclater. Voilà un vrai guide complet qui te transformera de branleur en Cybernaute. Voilà le guide qui t’amènera à la vraie limite et fera de toi autre chose qu’un homme de métal supplémentaire.

C’est aussi le moyen de dépenser sans compter tes eurobiftons gagnés à la sueur de ton front au cours de ces longues nuits passées dans les rues.

Chrome : l’essence du Cyberpunk.

Couverture de l'édition originale américaine de l'extension Chrome 2 pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Voilà l’extension incontournable par excellence. Comme la plupart des jeux de rôle, Cyberpunk 2020 propose un éventail de suppléments dont la plupart restent assez dispensables, du moins pour les Meneurs de Jeu qui ne pèchent pas par leur manque d’imagination, ou bien ceux qui disposent d’une bonne culture du genre cyberpunk dans sa forme littéraire ; la série des Chrome se place néanmoins à part dans cette liste, car dans n’importe lequel de ces ouvrages vous trouverez toujours un truc intéressant pour mettre encore plus de cyber dans votre punk. Toujours. La plupart du temps, d’ailleurs, vous n’aurez que l’embarras du choix et celui-ci sera dicté par vos fonds ou bien votre réserve de points d’Humanité – voire les deux à la fois : ces livres sont addictifs à ce point-là.

Depuis les divers accessoires, plus ou moins utiles selon les situations, jusqu’à l’indispensable matos à viander, à longue portée comme au contact, en passant par les (très) nombreuses prothèses et autres augmentations corporelles, des plus esthétiques aux plus fonctionnelles, mais aussi par les véhicules de tous gabarits, civils ou militaires, pour la frime ou bien utilitaires, et des tonnes de services, dont les plus inattendus, comme ceux vous proposant de faire vos courses ou de garder vos animaux domestiques, un Chrome reste le premier compagnon du Cyberpunk. D’ailleurs, il n’y a nul besoin d’y regarder de bien près pour voir dans cette série de catalogues la parfaite incarnation de cette société d’hyperconsommation du futur qui ressemble tant à la nôtre. Comme quoi, les jeux peuvent très bien refléter la société…

Couverture de l'édition française de l'extension Chrome 3 pour le jeu de rôle cyberpunk 2020D’ailleurs, si le nombre de ces suppléments se cantonne à quatre, ils se rattrapent néanmoins par leur densité et leur diversité : avec une moyenne de 100 pages par opus, vous y trouverez un nombre d’équipements proprement phénoménal, qui dépasse à chaque nouveau numéro celui du précédent – au moins sur le plan du pur délire, voire des différents hommages aux ténors du genre sur les divers médias où il s’est exprimé, depuis les livres jusqu’aux films en passant par les BD. Il faut le voir pour le croire à vrai dire, car en parler seulement ne leur rend pas justice. Pour cette raison, n’hésitez pas à plonger un jour dans un de ces suppléments, et de préférence tête première : comme le netrunner furetant au tréfonds d’un océan de données, vous ne risquerez pas de toucher le fond.

Ou alors, ce sera juste le fond de la Limite…

Chrome
Oriflam, 1991-1996
80 pages, env. 35 € par volume

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Cyberpunk 2021, site de fans et de ressources de jeu

Mekton II

Couverture de l'édition originale américaine du jeu de rôle Mekton IIMEKTON II. Le système complet pour les aventures de science-fiction et de mechas géants. Construction fluide pour les véhicules de combat, les chasseurs spatiaux et les robots. Combat détaillé mais rapide à la fois au niveau humain et au niveau des machines de guerre. Et un système de rôle passionnant qui vous laisse devenir le héros de vos propres aventures de science-fiction aux commandes de mechas.

Maintenant, rejoignez une nouvelle génération d’hommes et de femmes qui font face avec courage à d’incroyables dangers, à des chances de succès impossibles, et au défi de l’ultime machine de guerre – MEKTON II. (1)

En s’ouvrant à la culture anime à travers un ensemble d’œuvres comprenant des titres tels que Robotech, Voltron ou Transformers, les États-Unis donnèrent la part belle au genre mecha dès le début des années 80, et entre autres parce qu’il s’affirme technophile à bien des égards le public nord-américain devint vite assez friand de cette branche de la culture populaire japonaise. Son succès en Amérique – même s’il reste incomparable à celui qu’il connait au Japon – se mesure entre autres aux différentes productions qui se basent sur ce genre, qu’il s’agisse de comics – dont la plupart adaptent les diverses licences déjà évoquées – mais aussi de magazines (Mecha Press, à présent disparu) et même de films à l’occasion (Robot Jox ; Stuart Gordon, 1990).

Couverture de l'édition américaine de l'extension Roadstriker II pour Mekton IILes jeux de rôle et de plateau, bien sûr, ne se trouvèrent pas en reste et au bien connu Battletech (FASA Corporation ; 1984) on peut ajouter les plus obscurs Mechas! (Flagship Games ; 1993) ou OHMU War Machines (TBA GAmes ; même année) ainsi que Heavy Gear (Dream Pod 9 ; 1994), et cette liste ne se veut en aucun cas exhaustive… À l’exception du tout premier titre cité ici, Mekton les précède tous et à la différence de ceux-là, son but avoué consistait à permettre de jouer dans un univers typique des animes de mechas au lieu d’en utiliser seulement les machines. Plus qu’un rêve de mechaphile, Mekton était donc surtout un rêve de fan de mangas et d’animes.

Voilà pourquoi une des caractéristiques de Mekton II consiste à permettre aux joueurs d’échafauder tout un background, un passé complet pour leur personnage – background ici appelé Lifepath, pour « chemin de vie ». Ceci afin de leur permettre d’implémenter dans leurs parties ce qui reste deux éléments-clé de la culture manga : le développement des personnages et de leurs relations entre eux. Ainsi, ce Lifepath comprend-il aussi bien l’aspect familial que les amitiés et les inimitiés, ou encore la vie romantique et les détails physiques ainsi que la personnalité : en tout, quatre pages de tableaux dans lesquels puiser à coups de dés ce qui fera les spécificités de votre personnage et de quelle manière il agira avec les autres.

Couverture de l'édition américaine de l'extension Mekton Empire pour Mekton IIQuant aux phases de combat, Mekton II propose un système qui semblera familier aux joueurs de Battletech, encore que les plateaux et leurs hexagones restent assez optionnels eux aussi ; tout dépend, en fait, du niveau de simulation désiré par les joueurs : les affrontements peuvent aussi se résoudre de la même manière que dans n’importe quel autre jeu de rôle – et afin de garder les choses simples et de les rendre compatibles entre elles, les règles restent les mêmes pour les personnages comme pour les mechas. Toute la différence avec Battletech tient dans la fluidité de la gestion des différentes actions, le système de règles tenant ici lieu d’ancêtre à celui de Cyberpunk 2020 en quelque sorte.

D’ailleurs, on retrouve aussi une certaine similitude avec Battletech dans le système de création des mechas, toute la différence étant que la construction se montre ici bien plus versatile et souple. De plus, le nombre d’équipements et d’options, mais aussi de configurations finales des engins s’avère sans aucune commune mesure avec celui de FASA. En fait, on ne choisit pas dans Mekton un type de mecha de départ, humanoïde ou quadrupède, volant ou sous-marin, on assemble simplement les différents composants dont on estime avoir besoin en laissant ainsi la forme définitive de l’engin se révéler en quelque sorte d’elle-même… C’est donc un système de construction unique en son genre, et qui se montre très vite addictif.

Couverture de l'édition américaine de l'extension Mekton Techbook pour Mekton IIDevant le succès du titre, les extensions fleurirent. Ainsi, Roadstriker II étendit les règles aux scaphandres méchanisés tout en développant les divers types de véhicules et de mechas transformables, jusqu’à permettre la création d’engins capables de se combiner les uns aux autres pour en former de plus grands ; de plus, il proposait aussi des règles de conversion pour Cyberpunk 2020, afin de faire passer mechas et personnages d’un univers à l’autre. Mais l’extension la plus prisée reste bien sûr le Mekton Techbook qui proposait près de 100 pages de composants, d’équipements, d’armes et d’options pour vos projets de mechas, ainsi qu’un nouveau système de pouvoirs psioniques.

En dépit du focus que fait Mekton II sur la branche du genre qu’on appelle real mecha, car elle tente de se cantonner au réel, comme son nom l’indique, ce titre n’en reste pas moins un objet de culte auprès des rôlistes (2) fans d’animes depuis sa première parution il y a plus de 25 ans : en raison de sa souplesse et de sa versatilité, tant sur le plan du système de règles que de la construction des mechas comme de l’univers du jeu qu’il n’impose pas et au lieu de ça encourage les joueurs à créer le leur, Mekton II demeure une référence incontournable, et même le meilleur dans sa catégorie – pas moins.

(1) la traduction de ce quatrième de couverture est de votre serviteur.

(2) terme désignant les joueurs s’adonnant aux jeux de rôle sur table.

Note :

Les connaisseurs parmi vous savent que Mekton II finit par laisser place à Mekton Zeta, qui présente une sophistication extrême par rapport à son prédécesseur : en raison de cette sophistication, j’ai préféré commencer par une itération plus simple afin de ne pas décourager les lecteurs désireux de tenter l’expérience Mekton mais qui auraient pu se trouver rebutés par la complexité de sa dernière version. Quoi qu’il en soit, Mekton Zeta fait l’objet d’un autre billet.

Mekton II, Mike Pondsmith
R. Talsorian Games Inc., 1987
94 pages, env. 30 € (import seulement)

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Mekton Zeta.com, site de fans et de ressources de jeu (en)

Cyberpunk 2020 : Les Années noires

Couverture de l'édition française du jeu de rôle Cyberpunk 2020Les Corporations dirigent le monde du sommet de leurs gratte-ciels, recourant à des armées de cyborgs assassins pour assurer leur pouvoir. Dans la rue, les Boostergangs rôdent, semant mort et destruction dans une cité décadente et livrée à elle-même. Pour le reste, tout le monde s’envoie en l’air, tels les techies chébrans se livrant à de passionnantes sculptures sur chair sur les roadwarriors en armure de combat. Clubs chauds, bars glauques, rues coupe-gorge ; le futur n’a jamais semblé aussi noir.

Mais vous pouvez le changer. Vos poignets sont munis de connections interface, des armes ont été greffées sur vos bras, des lasers remplacent vos yeux et votre cerveau retentit du hurlement des programmes bio. Vous êtes câblé, blindé cyber et prêt à en découdre lorsque vous vous élancez dans la Zone dont seuls les meilleurs peuvent espérer revenir. Vous êtes un CYBERPUNK.

Si maintenant le grand public connaît plutôt bien le genre cyberpunk, il y eut un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître où ce terme ne s’entendait que dans des cercles bien spécialisés et assez discrets. Ainsi, quand R. Talsorian Games sortit en 1988 la toute première mouture de ce jeu, alors intitulé Cyberpunk 2013, le monde des rôlistes (1) se trouva en quelque sorte pris de court : jusqu’ici, en effet, cette tranche particulière des joueurs s’intéressait plus volontiers à des titres placés dans des univers médiévaux-fantastiques ou de type space opera – qui la plupart du temps ne sont jamais qu’une transposition du précédent dans une science-fiction aux échelles galactiques –, voire parfois contemporains.

Couverture de l'édition américaine du jeu de rôle Cyberpunk 2020Mais avec son futur proche bardé de nouvelles technologies, d’ultra-violence urbaine et de réseaux informatiques, où les états ont cédé la place aux multinationales dans un parfait cauchemar ultra-libéral qui vend et achète tout, y compris la matière première humaine, Cyberpunk se démarquait complétement de tous les autres titres du domaine – et de l’écrasante majorité des productions de tous les autres médias, y compris le jeu vidéo, pourtant à la pointe de la technologie par définition. Bref, à défaut de se montrer révolutionnaire ou même juste précurseur, Cyberpunk s’affirmait comme pour le moins original ; en fait, il se contentait de transposer dans le jeu de rôle la dernière branche en date, à l’époque, de la science-fiction…

Néanmoins, Cyberpunk y ajoutait un élément assez unique, et peut-être même exclusif à ce titre, en tous cas dans les limites de mes connaissances : il s’agit du concept de la Limite. Car si chacun dans l’univers de Cyberpunk peut se faire greffer les extensions artificielles de son choix, il y a un prix à payer, celui de l’humanité perdue ; une des caractéristiques des personnages, en effet, tient dans leur niveau d’Humanité, qui baisse d’une certaine quantité à chaque élément cybernétique ajouté : une fois l’Humanité réduite à zéro, le Maître de Jeu prend la feuille de personnage au joueur, faisant donc du personnage en question un PNJ – pour Personnage Non-Joueur. Bref, trop de cybernétique tue le personnage, en gros.

Couverture de l'édition américaine du supplément Chromebook pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Bien sûr, il va de soi que cette Limite ne sert qu’à éviter aux personnages de devenir trop puissants et trop vite en se bardant en quelques scénarios à peine des éléments artificiels et des extensions les plus avantageux : il apparaît en effet assez évident que remplacer des organes naturels par leurs équivalents artificiels ne devrait perturber que des gens qui le sont déjà plus ou moins (2) ; même si les concepteurs du jeu donnent à plusieurs reprises, dans le livre de règles comme dans plusieurs extensions, divers exemples de personnages qui ont franchi la Limite à jamais, ces mises en scène évoquent plus des tentatives somme toute assez peu concluantes pour justifier un système de règles hélas un peu bancal sur ce point.

Car pour le reste, Cyberpunk se montre d’un réalisme à toute épreuve, voire même exemplaire, surtout compte tenu de la complexité qu’ajoute la sophistication des extensions cybernétiques mises à la disposition des joueurs. Et par-dessus le marché, ce réalisme se double d’une simplicité dans la résolution des situations et des combats qui laisse pantois, surtout quand Cyberpunk n’est pas le premier jeu du genre auquel on s’adonne. Ici, quelques jets de dés à peine suffisent à déterminer le résultat des actions les plus rocambolesques ; d’ailleurs, vous n’aurez besoin que d’un seul type de dé, le D10. Soulignons au passage que ce réalisme correspond à merveille à l’aspect « Hard Science » (3) du genre cyberpunk dont ce titre se réclame.

Couverture de l'édition américaine du supplément Night City pour le jeu de rôle Cyberpunk 2020Ce dernier aspect reste selon moi une des principales raisons derrière le succès international de Cyberpunk, et un succès qui se mesure entre autres au nombre d’extensions qui ont suivi la publication du premier livre de règles : plus d’une soixantaine en version originale, dont deux autres livres de règles, 26 sourcebooks et cinq livres de scénarios ; les éditeurs Atlas Games et Ianus Games publièrent eux aussi de nombreux suppléments, qu’il s’agisse d’aventures comme de livres de règles. Sur cette somme de publications, près de 50 se virent traduites en France, soit un chiffre plus que conséquent. Les fans d’exploration spatiale et ceux de mechas, par contre, regretteront de ne pas voir, respectivement, Deep Space et Maximum Metal dans le lot…

Si mon expérience de rôliste demeure assez limitée, Cyberpunk reste quoi qu’il en soit un de mes meilleurs souvenirs dans ce domaine. Quant aux joueurs plus aguerris, pour son réalisme et sa simplicité d’accès comme pour son potentiel hors norme et la vaste étendue de ses extensions, il s’affirme toujours comme une référence du genre même plus de 20 ans après sa parution.

(1) terme désignant les joueurs s’adonnant aux jeux de rôle sur table.

(2) je laisse délibérément de côté le débat consistant à tenter de trancher si oui ou non un personnage quel qu’il soit peut rester mentalement équilibré dans un univers comme celui de Cyberpunk…

(3) terme désignant les récits de science-fiction aux bases techno-scientifiques très solides.

Séquelle :

Les auteurs de Cyberpunk 2020 prolongèrent cet univers à travers Cyberpunk 3.0 qui présente des différences assez drastiques avec l’édition précédente, au point d’ailleurs que de nombreux joueurs s’y trouvèrent bien assez mal à l’aise pour préférer en rester à la seconde édition du titre.

Cyberpunk
Oriflam, 1990
250 pages, env. 40 €

– le site officiel de R. Talsorian Games (en)
Cyberpunk 2021, site de fans et de ressources de jeu


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